pop-rock
Demis Roussos
Interview
L’année 2009 marque le grand retour de Demis Roussos, avec un album magnifique et déroutant puisque l’artiste nous a sorti le grand jeux avec un opus excessivement bien réussit.
Voilà un retour avec un nouvel album, alors que l’album précédant date de 1989. Que s’est-il passé pendant tout ce temps ?
Je n’en sais rien. Ce n’est pas un retour, mais un retour discographique tout simplement. Moi je ne suis allé nulle part. J’ai tourné dans le monde comme je l’ai toujours fait, en faisant des concerts et des rencontres musicales. Le dernier album de 1989, était un album de world music, plutôt pour mon plaisir personnel que pour des raisons commerciales. J’ai arrêté d’enregistrer parce que je n’avais pas grand chose à dire. Je me considère plus comme un musicien que comme un chanteur, et un musicien enregistre quand il a quelque chose à exprimer. J’ai donc tourné dans le monde, j’ai rencontré le groupe Little Barrie, avec lequel on a eu des affinités sur le plan musical. On a bien discuté, on a eu un bon contact. Quand j’ai rencontré mon producteur actuel, Marc Domenico, on a eu cette idée de faire un album vintage. On a pensé à ce groupe, on a pensé que ça pourrait être les bonnes personnes pour réaliser cet album en studio.
Cet album a été enregistré d’une manière assez particulière ?
On a enregistré en live, pour pouvoir aller le jouer sur scène. On a fait un album très pur, très simple, sans fioriture, dans un style précis, dans un studio mythique avec une ancienne console des années 60 que les Beatles utilisaient, avec des amplis de l’époque, pour que l’on puisse adapter la musique que l’on voulait faire avec un son approprié. C’est comme ça qu’est né ce produit vintage, très inspiré par les années 60-70. On a travaillé avec Little Barrie, car bien qu’ils soient jeunes, ils sont aussi friands de cette musique que moi. Tout tombait bien, c’est un album d’équipe. Je crois aux équipes, je crois que quelque chose se fait bien quand il y a une équipe qui pense et qui crée la même chose. C’est comme ça qu’on a fait cet album, sans fioriture, sans rien. Je sais que c’est inattendu, c’est étonnant. La question est « Est-ce que ça plait ? ». Je pense que ça plait à la plupart des gens. Quelques uns hésitent. Mais les gens qui hésitent sans exprimer une opinion alors que dans leur fond intérieur ils aiment sont des gens qui devraient aller voir un médecin, parce qu’ils ont un problème dans la tête.
C’est assez étonnant car Little Barrie fait une musique qui vous plonge dans le passé. Qu’est-ce que vous avez ressenti ?C’est un peu la madeleine de Proust, vous vous êtes retrouvé dans certaines années, par rapport au studio, vous avez retrouvé des sensations de l’époque ?
Tout à fait, je suis quand même un enfant des années 60-70. Les chansons sont tirées de là, on a utilisé de jeunes compositeurs français, mais Picci a vécu en Angleterre et il adore ce son vintage des années 60-70. Il fallait prendre tous les ingrédients qui appartiennent à ce monde. J’ai choisi une interprétation plutôt blues/soul. En tant qu’interprète, je me suis plutôt retourné vers mes racines. Mes racines remontent à avant Aphrodite’s Child, j’étais dans des groupes de soul et de blues. ‘Back to the Track’, c’est ça mon retour aux sources.
Cette jeune génération n’a pas vécu les années que vous avez vécues, parce que c’est tout un environnement politique, social. Qu’est-ce qui leur plait tant de plonger dans ces années là, d’après vous ?
C’est une preuve qu’il faut regarder de plus près les jeunes. Les jeunes sont mal compris aujourd’hui et c’est pour ça qu’ils se révoltent. Ils paient la note de tous les problèmes sociaux, et spécifiquement les problèmes issus de la crise économique. C’est eux qui sont sans travail, qui se révoltent, qui font des choses qui ne sont pas dans leur nature. Les jeunes ont plein de choses à nous apprendre et à nous montrer. Little Barrie sont des musiciens jeunes qui se sentent très proche d’une musique vintage alors qu’ils n’ont pas vécu dedans. Cela veut dire que les jeunes comprennent et qu’ils ont envie de s’exprimer.
Ça représente des années d’insouciance ? Mai 68 ? Il y a peut être ce sentiment de liberté dans cette musique ?
Peut être que ce sentiment de liberté les excite, parce qu’ils ne l’ont pas, on ne leur donne pas.
Dans les textes, dans les chansons, on parle d’amour et de paix, mais il y a aussi un peu de colère dans la dernière chanson.
C’est une chanson politique sur les groupes internationaux qui nous gouvernent. La terre est dirigée par des groupes, des clubs, des lobbies. Ils font la pluie et le beau temps. Il est faux de croire que c’est un gouvernement qui gouverne un pays alors que ce n’est pas lui. Le gouvernement, ce sont tout simplement des employés de ces grands groupes, qui font les plans de la prochaine crise, de la prochaine guerre. On paie la note. « This is why they don’t give a fuck », pour nous autres. C’est pour ça que le dernier discours de Gandhi est dans cette chanson, parce que Gandhi prêchait l’amour, la connexion entre les humains. C’est ça qui manque aujourd’hui, les gens ne communiquent plus. Ils ne peuvent pas discuter, trouver des solutions à leurs problèmes. On ne nous laisse pas communiquer. Ceux qui nous gouvernent et qui nous guident vers ce qu’ils veulent ne nous laissent pas communiquer. Ils inventent un nouveau portable ou un nouvel ordinateur tous les jours, pour nous engager dans un tourbillon de non-communication, pour aller vite soit disant. C’est ce manque de communication qui nous emmène dans la merde.
Vous êtes en colère Demis !
Je suis en colère mais quelque part je m’en fous parce que je suis un bon Grec philosophe. J’ai hérité ça de mes ancêtres et nous les grecs on philosophe tout. Je suis en colère sans trop être en colère, ça ne sert à rien.
Revenons au fond de cet album. Il y a deux reprises, avec des artistes que vous aimez bien. Pourquoi ce choix de Randy Newman et Johnny Cash ?
Randy Newman est un musicien très talentueux, que j’ai eu la chance de rencontrer quand je vivais à Los Angeles. Johnny Cash est une icône de la musique country, une musique qui habite en moi et que j’avais très envie de faire un jour.
On vous connait dans différents genres, au fur et à mesure des années. Il y a eu l’opéra, le rock, soul, blues. On a l’impression que vous êtes à l’aise partout avec votre voix. Vous avez envie de voyager ? Vous aimez ça ?
C’est ça un artiste. J’ai commencé très jeune en étant musicien de jazz. Je suis passé à des groupes de soul et de blues, après je suis passé dans une période pop psychédélique, avec Aphrodite’s child. Ensuite, je suis passé dans une période variété. C’est comme les peintres, avec leur période jaune, verte, blanche. Un jour, quand j’ai vu que je n’avais plus grand-chose à dire, je me suis arrêté d’enregistrer. Il y avait une vieille envie qui murissait dans ma tête pour un son différent. Marc Domenico et Little Barrie m’ont donné la possibilité de la réaliser.
Est-ce que ça vous fait plaisir quand on vous dit que vous êtes un monument du patrimoine grec ?
Oui, bien sûr ça fait plaisir. Je pense que pour tout être humain, quand on touche à son patrimoine, à ses origines, ça le touche. Pour un Français c’est pareil, pour un Anglais c’est pareil. Je suis heureux, fier d’avoir pu faire quelque chose d’artistique et si cela a pu aider culturellement mon pays, si j’ai pu apporter une petite pierre à la culture de mon pays. Elle n’en a pas vraiment besoin, on a une très longue histoire donc une culture énorme.
Une tournée s’annonce, le 25 septembre au Grand Rex sera un peu le début de la tournée. Vous serez avec les musiciens qui vous ont accompagné en partie dans cet album ?
Je vais faire ce concert à Paris, suivi par une tournée que je souhaite voir arriver. Le contact avec la scène pour un artiste comme moi est très important.
Comment vous la sentez cette scène ? Vous la voyez déjà, parce que vous avez enregistré dans des conditions live. Vous savez comment ça va se passer ?
J’ai envie de faire un spectacle assez simple, assez sobre, comme un « happening ». J’aurais aimé être sur scène et que le public me demande quoi chanter. J’aimerais bien avoir cette ambiance. Pour moi, le challenge c’est de pouvoir adapter des chansons de variété dans ce son. C’est une partie intéressante de ce projet.
C’est un concert qui peut durer 3-4 heures !
Oui, avec des arrêts, on va manger et on revient !
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