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Abd Al Malik «J’étais bon élève le jour et délinquant la nuit»

Qu’Allah bénisse le film d’Abd Al Malik

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Abd Al Malik «J’étais bon élève le jour et délinquant la nuit» 4

A l’occasion de la sortie sur grand écran du film « Qu’Allah Bénisse La France », Zikeo est parti à la rencontre du chanteur Abd Al Malik qui nous parle de sa première oeuvre cinématographique.

D’où est venu le désir de porter à l’écran votre livre autobiographique « Qu’Allah Bénisse La France » ?

Je n’ai pas écrit ce livre pour en faire un film mais en l’écrivant, j’avais conscience de poser un jalon que je pourrais approfondir par la suite, grâce au cinéma. Cet art a une grande capacité d’humanisation, il permet d’aller voir derrière les apparences, de montrer que tous les êtres fonctionnent de la même manière. On fantasme énormément sur le rap, les cultures urbaines, la banlieue, la délinquance, l’islam, et j’ai voulu aller à l’encontre du discours sociologique ou médiatique, qui donne des statistiques mais parle très peu d’humain. Beaucoup de films sont faits sur les cités mais trop souvent d’un point de vue extérieur. Ils peuvent être beaux mais ils ne rendent pas justice à ce que l’on est. Par exemple, ils vont traiter de la thématique de l’islam par le canal de l’intégrisme religieux. L’intégrisme existe mais ne concerne qu’une minorité.

Aucun film ne vous a rendu justice ?

Si, « La Haine ». Pour moi, c’était la première fois qu’un cinéaste voulait vraiment montrer la cité, avec amour mais aussi avec une démarche artistique. Découvrir ce film gamin a été fort pour moi, presque fondateur. Et puis après, j’ai rencontré Mathieu Kassovitz, je suis devenu son ami, on a eu de grandes discussions. C’est lui qui m’a poussé à être réalisateur. Mais aussi vrai et sincère que je puisse trouver « La Haine », ce n’est quand même pas un regard de l’intérieur. Ce phénomène n’est pas propre à la France. Quand on regarde le néo-réalisme italien, c’est pareil. Moi, j’ai voulu casser ce cycle. Sans être revanchard mais avec l’ambition de nous raconter. Quand les italo américains ont découvert « Le Parrain » ou « Mean Street », enfin ils se sont vus. Enfin ils faisaient partie de l’Amérique. Moi aussi, j’ai envie qu’on parle de nous et de nos problématiques sans que ce soit exotique. Mon ambition est de donner à voir, de sortir d’un fantasme malsain sur nous. Qu’on voit en Régis, Mike, ou Samir, la France, avec toutes ses ramifications communautaires. Mes racines sont africaines, certes, mais mes fruits sont français, et européens. J’ai grandi à Strasbourg, la notion d’Europe existe peut-être plus pour moi que pour un Parisien !

Le film pose la question de savoir jusqu’où on peut aller dans l’illégalité sans se brûler les ailes…
Moi j’étais bon élève le jour et délinquant la nuit. Non parce que je souffrais de schizophrénie mais parce que lorsqu’on est dans un groupe, on ne veut pas être ostracisé. Mon personnage se construit avec ce qu’il a autour de lui. Sa mère l’élève seule, dans une précarité réelle, un milieu criminogène où la délinquance est un moyen d’exister. En même temps, il a des passions : la littérature, l’écriture, le rap… Et il a l’ambition d’en faire quelque chose. Il a en puissance ce qui va lui permettre de s’en sortir mais ce n’est pas encore effectif.

Quand son copain leur apprend qu’il est rattrapé par sa faute, qu’il va sans doute prendre 10 ans de prison, on se dit cette peine aurait pu tomber sur lui…

Oui, j’avais cette envie de filmer quelque chose d’impalpable : la chance. Comment untel va s’en sortir et pas l’autre ? Lui aussi aurait pu prendre cette peine de prison, ou être abattu à la place de Rachid. Il était important de me remettre dans ma peau de l’époque, que le Abd Al Malik d’aujourd’hui disparaisse pour ne pas étouffer le jeune Régis.

abd-al-malik-film.jpgLa force de votre livre passait par l’expression d’un cheminement moral et intime… Comment conserver cette intériorité au cinéma ?
Grâce aux acteurs. On avait très peu de temps pour le tournage : vingt-huit jours. Mais on a travaillé plus de six mois en amont. On a fait beaucoup de répétitions, de lectures. On allait aussi sur les lieux de tournage pour discuter, se mettre dans l’ambiance. Il fallait qu’ils assimilent le texte, qu’on ne soit plus dans le cinéma mais dans la vraie vie, qu’ils soient totalement dans leurs personnages, qu’ils oublient la caméra. Il n’y avait que le temps et le travail qui pouvaient permettre d’atteindre cela. Et évidemment leur talent. Car ils ont un talent incroyable. Et puis il fallait trouver la pierre angulaire sur laquelle je puisse construire cette justesse humaine : celui qui allait jouer mon rôle…

Comment avez-vous vécu le tournage de ce premier film ?
C’était mon premier film mais j’avais déjà réalisé des clips et j’ai l’habitude de travailler en équipe depuis vingt ans. Même si les egos des musiciens sont encore plus particuliers que ceux des acteurs ! On était vraiment contents de travailler ensemble, c’était une aventure merveilleuse. Ce film est une histoire d’amour dans tous les domaines : avec ma mère, avec Naouale, avec la musique, avec mes frères, avec mes potes, avec l’école, avec la cité et avec la France.

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